The Next Tape aime les contrastes. L’électronique et l’acoustique, la chaleur puis la mélancolie … Tout, du choix des sons à la composition des textes, laisse penser que Franck Litzler, Jonathan Dioudonnat et Virgine Léonce prônent le mélange des genres et des émotions. Et ça fonctionne.
En live, il est presque impossible de compter le nombre de fils sur la scène ou ils se produisent. Tapant et caressant ces machines mystérieuses et un brin futuristes, nos deux bidouilleurs de sons croisent leur folie électronique avec cette voix féminine particulière d’une douceur presque érotique. Interview du groupe, incarnant la nouvelle référence émergente à Grenoble en matière d’électro/nu jazz.
THE NEXT TAPE semble être la fusion de trois musiciens aux horizons très différents, et aux talents pourtant complémentaires. Pouvez-vous nous dévoiler ce que chacun apporte personnellement à la bombe TNT ?
[FRANCK] : Guitariste de formation, j’ai évolué dans plusieurs projets post-math rock / noise, donc très éloignées de l’univers musical de The Next Tape. Cependant, depuis quelques années je triture des claviers et suis très attiré par les séquenceurs et boites à rythmes, bref la programmation et le sampling… Je crois que ce qui nous réunit c’est l’envie de faire de l’électro / trip hop en mélangeant les singularités de chacun. C’est sans doute ce qui donne ce mariage de styles un peu surprenant dans notre musique. Dans le groupe je m’occupe des boites à rythmes et lignes de basse, et de la guitare évidemment. Je peux aussi apporter des petits sons ou mélodies. Avec Jonathan, les rôles s’inversent facilement.
Franck Litzler
[JONATHAN] : Je viens d’une formation classique au conservatoire de Grenoble en tant que saxophoniste, que j’ai complétée par une formation jazz sur Chambéry. Lorsque j’ai découvert les synthétiseurs, j’ai eu la sensation de pouvoir élargir à l’infini ma palette de couleurs. Issu du milieu acoustique, j’aborde les sons électroniques de la même manière, en modelant et en sculptant chaque son avec un grand intérêt pour le timbre et la couleur qu’il développe. Dans le groupe il n’y a pas de rôle définit à la manière d’un compositeur leader et ses musiciens exécutants la partition. Souvent les morceaux partent de bœuf où chacun propose des idées, rebondit sur l’idée de l’autre. Nous enregistrons beaucoup nos moments d’impros, ce qui nous permet ensuite de structurer nos idées.
[VIRGINIE] : J’écris les paroles, les mélodies des lignes de chant. Mais je travaille aussi avec Franck et Jonathan pour proposer des idées d’arrangements sur les détails et la finalisation de la partie instrumentale. Je suis davantage autodidacte ayant profité de l’expérience du jazz, du gospel, de la salsa et de l’électro. Ce beau mélange est devenu moi. Je n’ai pas envie de me spécialiser dans un style. Et puis, je n’y arriverai pas ! Certains ont du talent pour ça, pas moi ! Enfin, je m’ennuierai. J’ai besoin de varier pour m’amuser. Ce qui m’inspire ce sont les
mélanges… Le résultat de nos fusions aurait pu pourrait être chaotique. Au contraire, il est notre richesse et ce qui permet des morceaux aussi variés.
[FRANCK] : Ce qui fait l’originalité de notre son provient alors de cette volonté de faire de l’électro un peu différente en mariant à la fois le jazz, la pop, le rock avec des sons rétro 8 bits et cette voix envoutante de Virginie qui nous fait dériver avec bonheur sur le R&B ou la soul…
Virginie Léonce.
Votre EP, (sorti en décembre 2015) est en effet un melting-pot musical singulier et très bien maîtrisé, apportant quelque chose de neuf. Il emporte l’auditeur dans des sonorités sensuelles et des bidouillages de sons étonnants…Mais on aimerait bien savoir ce qu’elles racontent ces chansons ?
[VIRGINIE] : Elles parlent de mes expériences et sentiments face au monde et mon environnement. Parfois elles ne parlent de rien précisément. Je préfère celles-là d’ailleurs ! J’aborde des sujets divers avec des thématiques plus ou moins sérieuses. Je peux aborder le sujet des guerres comme FIREWORKS, de l’amour comme SUMMER ou plaisanter sur le monde virtuel avec FANCY TOY. J’aime aussi jouer la comédie et imaginer des personnalités comme IN MY HEAD qui parle d´une femme avec un brin de folie.
J’aime inventer des personnages. J’aime l’emphase et exagérer ce que je ressens, pense, vis et le tourner en dérision ou en drame. Jouer des rôles me permet d’utiliser différents styles de voix : nasillarde, chaude, jazzy, ragga…Je ne m’ennuie pas (…) Mon objectif est de transmettre des émotions, de m’exprimer, d’être authentique et de m’amuser durant l’écriture et le concert.
Jonathan Dioudonnat.
Il est vrai que Virginie en sidère par sa voix et sa présence sur scène, qui évoquent une sorte de naïveté trompeuse et pleine de cicatrices. De quelle planète sort-elle, et comment sa route a-t-elle croisé la vôtre ?
[JONATHAN] : Au début nous étions sur une formule instrumentale. La question de rajouter une voix est venue suite à nos nombreuses impros. J’ai passé alors tout un été à chercher une chanteuse sur des sites spécialisés, permettant de mettre en contact les musiciens en fonction de leurs projets. Lorsque j’ai rencontré Virginie, sa voix a été un coup de cœur, une évidence…
Oui… Peut-on en savoir plus sur cette complicité musicale un peu singulière qui se ressent entre Franck et Jonathan ?
[FRANCK] : Avec Jonathan, c’est une rencontre artistique et humaine assez rare dans le parcours d’un musicien. On croise relativement peu de personne avec qui il peut y avoir une symbiose aussi bonne… C’est ce qui se passe avec Jonathan depuis 2/3 ans que nous travaillons ensemble. Tout naturellement la volonté d’aller plus loin dans notre engouement pour les séquenceurs, arpegiatteurs, boîte à rythmes et les sons rétro 8 bits s’est imposée, bref le plaisir de pousser l’électro dans ses retranchements, ensemble. C’est pour cela que nous avons monté le projet K-ARP dans lequel nous pouvons laisser libre cours à nos explorations électroniques improvisées !
[JONATHAN] : Le milieu des synthétiseurs, pour peu qu’on l’approche comme un geek, est suffisamment barré pour ne pas rencontrer de gars qui nous ressemble. Du coup pendant de nombreuses années j’avais l’impression d’être un peu seul dans mes petits délires de musicien curieux. Lorsque j’ai rencontré Franck, je me suis dit « copain ?? ». Nous sommes à ce point connectés musicalement que nous arrivons à nous faire rire en improvisant ou en proposant des sons, nous pouvons même des fois anticiper la réponse de l’autre sur le choix
des sons ou des phrases musicales. C’est une rencontre qui ne se fait pas tous les jours effectivement.
Et ça fonctionne. Mais dis moi Franck, The Next Tape fait partie de l’un de tes nombreux autres projets artistiques… (le groupe grenoblois SZ, Le Festival le Tympan dans l’œil pour ne citer que les plus connus…). Qu’est-ce que TNT représente pour toi au milieu de tout ça ?
[FRANCK] : The Next Tape me faire renouer avec l’aventure d’un groupe de scène. En effet depuis une petite dizaine d’années maintenant, je fais exclusivement du ciné concert avec SZ et j’en tire une grande satisfaction ! TNT me permet de faire la synthèse entre les différents styles de musiques qui me font vibrer. C’est aussi une aventure humaine très riche et je trouve que ce trio a vraiment du potentiel !
C’est le cas. J’ai d’ailleurs pu voir que vous avez récemment tourné un clip, pour un nouveau titre, « Fancy Toy » : pouvez-vous nous en dire plus ?
[FRANCK]: Tout est parti d’une improvisation un peu sur le ton de la plaisanterie. Nous avons commencé à explorer des sons de clavier très kitsch et finalement nous nous sommes laissés prendre au jeu de la composition. Les retours sur ce morceau ont été tout de suite très bons et Antoine Dubois et Massangbe nous ont proposé de tourner un clip l’été dernier. Il verra le jour au premier semestre 2017.
[VIRGINIE] : Le clip sera rétro, acidulé, kitch mais toujours classe comme la musique et l’image du groupe. Un très gros travail a été réalisé par les réalisateurs et par notre ingénieur du son, producteur et ami Dan Bartoletti. Le résultat sera à la hauteur !
Image du clip Fancy Toy
Qu’est-ce que vous nous préparez d’autre pour la suite ? Un électro toujours « jazz » ou faut-il s’attendre à ce que votre exploration musicale nous emporte ailleurs ?
[FRANCK] : Comme dit précédemment nous préparons la sortie du clip et d’un prochain disque autour de juin 2017. Nous allons figurer sur la cuvée grenobloise 2017, avons encore quelques dates à honorer et nous espérons pouvoir trouver de bonnes scènes à partager au premier semestre 2017. Nous allons également chercher un tourneur. Quant à savoir si le jazz sera toujours aussi présent dans nos compositions c’est l’avenir qui le dira ! Mais je pense que nous sommes tous sensibles à cette esthétique musicale même si elle est loin d’être notre seule source d’inspiration…
[JONATHAN] : (…) Le jazz est pour moi la musique la plus contemporaine, toujours en évolution et en création, empruntant plusieurs styles. Si l’on considère le jazz de cette manière, alors oui il y aura toujours du jazz dans The Next Tape.
[VIRGINIE] : Du jazz il y en aura toujours car il fait partie de nos influences. Tout comme il y aura du rock et de l’électro… Il y aura toujours la présence de ces styles. Après, où serons-nous demain, personne ne le sait ! Mais peu importe les ingrédients que l’on aura mis dans le bol. L’important est que le résultat soit toujours à notre goût, nous fasse voyager et continu de nous garder en appétit.
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