S’il n’y a pas ce quelque chose d’épique-addict et de totalement solennel dans la musique de Shubiao Quartet, je ne sais plus à quel saint me vouer. Il n’y a pas qu’en moi d’ailleurs que cette musique de tradition mongole a résonné : quand l’équipe a su que le groupe – qui trône fièrement sur la Cuvée Grenobloise 2025 – allait monter sur la scène de la Belle Electrique ce vendredi 7 février, l’annonce a eu son petit effet.
Et c’est devant une fosse bien remplie que le quartet tant attendu dévoila ce soir-là ses instruments venus d’Asie centrale (le morin khuur, violon à tête de cheval, ou encore le tovshuur, un luth à deux cordes), qu’il gère manifestement avec la plus grande précision. Au-delà d’un show réglé comme une horloge, et des émotions nouvelles qu’il semble générer au plus grand nombre, ce qui nous personnellement le plus plongé dans un profond bad trip, il faut l’avouer, c’est le khöömii, ce chant diphonique traditionnel.
Parce que oui (et honte à nous?) il nous a fallu de très -très, très- longues secondes avant de réaliser que le son que nous entendions parfois provenait de la gorge des chanteurs. « C’est l’exemple parfait du mec qui a avalé un instrument » est la phrase entendue dans le concert qui a su mettre des mots sur nos pensées inavouables : dire qu’on a été bluffé.es ne serait qu’un trop faible euphémisme, et si les sons pouvaient sembler étranges aux oreilles peu habituées aux sonorités issues de la musique du monde, ils étaient a minima une découverte notable – au mieux, et ce fût le cas pour nous, une transe bienvenue.
Tandis que l’un des deux chanteurs évoquait régulièrement, entre chaque morceau, des « montagnes enneigées et de rivières qui serpentent dans des paysages infinis », d’épopées et de légendes venues d’ailleurs, la foule dansait timidement, mais paraissait complètement sous le charme, il faut le dire. La surprise était de taille quand, à la fin du set, le groupe expliqua s’être formée en 2023 seulement, et être à l’aube de la sortie de son premier EP le 14 mars. Avant que Los Burritos Santos, le deuxième groupe local de la soirée, vienne récupérer le flambeau, pour un voyage un peu plus au Sud, c’est la salle entière qui s’est chauffé les mains de longues minutes, l’air ébahi, carrément emballée par le petit phénomène Shubiao.

Los burritos santos